Données immobilières, études et conseil

Location accession : faire de la location un tremplin vers la propriété

Nous poursuivons notre enquête consacrée aux formes hybrides de propriété immobilière en nous intéressant à l'apport de l'économie sociale et solidaire dans ce domaine. Nous en parlons avec Lionel Assoun, président directeur général d'Agora pour l'Habitant.   

Lucile MAGNALDO

Publié le 11/04/2025

 

Agora pour l’Habitant est une société foncière coopérative (SCIC) créée à Lyon en 2022 par Lionel Assoun, Barthélémy Doat et Caroline Liby pour développer un nouveau concept : la location accession. Les ménages bénéficient d'un loyer modéré et versent un complément qui leur permet de se constituer une épargne en vue de l'achat du logement à un horizon temporel plus lointain que ne leur permettrait le PSLA (prêt social location accession). Le capital est apporté par des personnes physiques, dont les habitants eux-mêmes, qui souscrivent des parts sociales de la foncière et les acquisitions sont financées par des prêts locatifs sociaux (PLS).

Pourquoi avoir créé Agora pour l'habitant ?

LIONEL ASSOUN - L'AGORA POUR L'HABITANT

Lionel Assoun. Il manquait une solution d’accession sociale à la propriété pour les ménages qui ne peuvent pas emprunter. Or rester locataire toute sa vie, c’est payer trois fois le prix de son logement sans rien posséder à la fin. Agora pour l’Habitant veut faire de la location un tremplin vers la propriété. Elle s’adresse à des ménages sous condition de ressources (PLS) qui acceptent de s’investir dans la coopérative pour être des acteurs de leur solution de logement.

Concrètement que proposez-vous aux ménages ?

De devenir locataire d’un logement neuf de qualité moyennant un versement mensuel dont 85 % est un loyer attractif et 15% une épargne. Au bout de 10 à 15 ans, cette épargne constitue un apport leur permettant d’emprunter pour acheter. Un point fondamental : en tant que locataires, ils ont droit aux APL, ce que ne permettent pas les dispositifs existants d’accession aidée à la propriété.

Nous leur demandons aussi de souscrire 3 parts du capital de la foncière, soit 3.000 € : cela fait d’eux des membres de la coopérative et montre leur engagement dans le projet. Ils sont donc un peu plus que des locataires et ils vont d’ailleurs participer aux assemblées générales de copropriété. Ils sont ainsi placés dans une posture d’acquéreur en devenir et font une expérience qui ressemble à celle de la propriété.

Sont-ils engagés à acheter le logement ?

Non, ils continuent à bénéficier de la souplesse de la location aussi longtemps qu’ils le souhaitent. Leur épargne leur est acquise quoi qu’il arrive ; ils peuvent la récupérer et acheter un autre logement ailleurs.

S’ils achètent le logement qu’ils louent, comment le prix est-il fixé ?

La foncière s’engage contractuellement à le leur vendre à un prix fixé au départ correspondant au prix de revient indexé sur l’inflation. Ils sont donc protégés contre une hausse des prix immobiliers supérieure à l’inflation, phénomène observé depuis des décennies et qui a exclu tant de primo-accédants. 

Comment un locataire peut-il participer aux décisions de la copropriété ?

Techniquement, il suffit que la foncière, co-propriétaire en titre, lui donne un pouvoir. Mais l’enjeu est surtout qu’il puisse se projeter dans le statut de copropriétaire et être acteur de sa solution d’accès à la propriété. D’une manière générale, un locataire futur propriétaire est beaucoup plus attentif à l’entretien de son logement et de son cadre de vie. C’est un argument important pour nos investisseurs, sans parler d’une moindre vacance locative.

Ces investisseurs, comment les convainquez-vous de vous rejoindre ?

Notre premier argument est celui de la sécurité. Nous investissons dans des logements de qualité en zone tendue à des prix en moyenne 20 % inférieurs à ceux du marché. Pourquoi ? Parce que le conventionnement PLS nous permet de bénéficier d’une TVA à 10 % et de l’exemption de la taxe foncière sur la durée du prêt ; en outre, comme les bailleurs sociaux, nous bénéficions indirectement des quotas de logements sociaux imposés par la loi SRU, donc de prix bonifiés cohérents avec le plafonnement des loyers. Nos habitants vont bénéficier de cette décote et nos investisseurs sont en partie protégés contre une baisse des prix de l’immobilier. 

Et vos autres arguments ?

En plus de la sécurité, nos investisseurs recherchent de la rentabilité et de l’impact. Grâce à notre travail de recherche, nous sommes reconnus « Jeune Entreprise Innovante » par l’État[1]. Ce statut ouvre droit à une réduction d’impôt de 30 % à 50% du capital investi à condition de laisser les fonds pendant 7 ans. Soixante-dix personnes nous ont déjà apporté plus d’un million d’euros. Sans elles, rien n’aurait été possible. 

Quels sont les particularités du statut de coopérative pour l’investisseur ?

La coopérative est une entreprise à but lucratif limité. Elle peut verser des dividendes, mais ceux-ci sont plafonnés. Et les parts sociales ont une valeur fixe qui interdit de réaliser des plus-values.

Comment envisagez-vous votre développement ?

Nos premiers logements seront livrés en fin d’année à Lyon et à Villefranche-sur-Saône. Nous visons un premier seuil de 50 logements correspondant peu ou prou à une taille critique pour le fonctionnement de la société. À court terme, nous avons bon espoir de doubler notre capital grâce à la campagne de souscription en cours, accessible à tous. Mais la réussite de notre projet passe aussi par des partenariats. 

Quels types de partenariats ?

Nous avons été lauréat 2024 de la Fondation d’Innovation Sociale, nous sommes soutenus par la fondation Gecina. Pour la levée de fonds, nous recherchons la collaboration de gestionnaires de fortune, alias family offices dans le jargon, à la recherche de solution d’investissement à impact peu risquée.

Pour l’achat des logements, une niche en particulier nous intéresse : certains propriétaires fonciers porteurs de projet immobilier préfèrent plafonner le nombre de logements pour ne pas avoir à inclure le quota de logements sociaux imposés par la commune. Notre solution devrait les intéresser. Nous cherchons à nouer des partenariats avec les professionnels qui discutent avec eux et peuvent nous associer au projet. 

Sur quoi porte la recherche qui fait d’Agora pour l’Habitant une « Jeune Entreprise Innovante » ?

C’est de la recherche académique sur l’accession à la propriété, qui nous sert en particulier à projeter l’évolution de notre modèle dans le temps. Un exemple : si au moment de la vente à l’habitant, au prix convenu à l’avance, les prix de l’immobilier ont augmenté plus que l’inflation, nous ne pourrons pas racheter autant de m2 que nous en vendons. Il est donc utile de développer des outils pour mesurer ce frein.

Et quelle solution envisagez-vous ?

Nous travaillons sur un concept de propriété temporaire. Au lieu de vendre la pleine propriété, la foncière vend un droit réel immobilier plus accessible car limité dans le temps. À l’échéance, elle rachète ce droit à un certain prix. Il faut régler le modèle financier (valeur et durée) de sorte que l’habitant puisse récupérer idéalement la moitié de ses versements (un capital très substantiel) tout en maintenant une durée d’usage très longue, de l’ordre de 40 ans.

La foncière conserve alors son patrimoine pour le remettre en location…

Exact, d’autres ménages pourront ainsi bénéficier du tremplin de la location accession. Derrière cette solution – qui suppose une évolution de l’imaginaire lié à la propriété mais le BRS a ouvert la voie – il y a une idée de solidarité générationnelle à laquelle Agora pour l’Habitant est sensible.


[1] Agora pour l’Habitant est également labellisée Entreprise solidaire d’utilité sociale (ESUS)

Propos recueillis par Lucile Magnaldo et Jeanne Bazard

©david-tip-Unsplash

42.000

C’est le volume de logements neufs mis en vente depuis 10 mois. Un chiffre qui ne cesse de dégringoler depuis 5 ans (-37% vs 2023, et -59% vs 2019). 

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17.500

C’est le volume prévisible de logements neufs qui seront acquis par des investisseurs particuliers en 2024 en France métropolitaine. Un total le plus bas depuis plus de 15 ans, avant même l’extinction du dispositif Pinel.

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+0%

Les prix de vente du logement neuf restent stables en 2024 vs 2023, à 5370 €/m² stationnement inclus (TVA pleine). Hors aides à la vente, les valeurs ne faiblissent donc pas face à la crise.

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40%

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48.500

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12.000

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