Trois leviers pour dynamiser le développement du parc HLM

Comment les organismes HLM devraient muscler leurs équipes et monter en compétence afin de s’adapter aux contraintes économiques et produire plus de logements.

Tristan Ruiz

Publié le 11/10/2022

 

Sous le mot d’ordre « Réussir » à faire du logement la grande cause du quinquennat, le Mouvement HLM réuni à Lyon pour son 82e congrès a appelé le Gouvernement à « redonner aux organismes HLM la capacité de réussir à notamment répondre à l’énorme enjeu de la demande ».

Cet enjeu n’est guère nouveau, mais les volumes d’agrément continuent de baisser depuis 2017 hormis une hausse de rattrapage en 2021 et les prévisions se trouvent largement en-dessous de la barre des 100 000 logements en 2022 et 2023. Les raisons invoquées sont multiples et connues : coût excessif du foncier, documents d’urbanisme contraignants, absence de volonté politique, envolée des prix de revient…

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Le facteur coût est patent. Ainsi, dans les métropoles régionales et en moyenne couronne parisienne, le prix de revient de la majorité des programmes collectifs dépasse 3 000 € HT/m² habitable. Cela n’est plus compatible avec le modèle économique du logement social, dont les bilans de loyers d’équilibre normalement subventionnés et capitalisés permettent rarement damortir plus de 2 400 € HT/m² habitable.

Passer d’une culture de la maîtrise d’ouvrage à une culture du développement

Historiquement, le parc de logements sociaux s’est développé sur des fonciers mis par les communes à la disposition des organismes HLM. Leurs compétences, en ce qui concerne la production, se sont ainsi organisées autour de l’activité de maîtrise d’ouvrage et leur culture professionnelle en reste profondément imprégnée.

Rappelons que, pendant que le contexte économique évoluait fortement, au cours des 15 dernières années, notamment par la hausse des coûts du foncier et de l’immobilier, et la baisse du « reste à vivre » des ménages, les bailleurs sociaux ont recouru de plus en plus aux VEFA de promoteurs privés pour développer leur parc. Fortement encouragée par les pouvoirs publics au moment du plan de relance qui a suivi la crise de 2007 (ventes en bloc), la VEFA a fini par devenir majoritaire. Elle est passée de 3 % des agréments en 2007 à environ 56 % aujourdhui.

Sans nous prononcer sur les avantages et inconvénients respectifs de la VEFA et de la maîtrise d’ouvrage directe (MOD), il paraît assez clair que c’est dans la MOD que se trouvent aujourd’hui les progrès à aller chercher pour dynamiser la production.

Trois leviers stratégiques

Face à ces constants, trois pistes sont à regarder de près pour réaffirmer des capacités de développement complémentaires à la VEFA (laquelle pourra alors décroître progressivement en proportion) :

  • La constitution de services de développement foncier
  • L’optimisation des montages d’opération
  • L’extension du parc par acquisition de logements privés à rénover

1) L’embauche de développeurs fonciers est une nécessité pour repérer les parcelles mutables, notamment dans le tissu urbain constitué diffus. Les organismes les plus actifs en matière de production en disposent tous. [1] 

2) L’optimisation des montages d’opération sera bientôt incontournable pour alléger le coût du foncier. Il est de moins en moins possible d’équilibrer des opérations constituées à 100 % de logements locatifs sociaux en PLAI/PLUS.

  • Des produits daccession sociale (PSLA, BRS) devraient quasi systématiquement les compléter pour absorber par péréquation une partie des coûts du foncier.
  • En secteur tendu, les montages dissociants (ULS, BRS locatif…) qui permettent de « sortir » du loyer d’équilibre une partie du prix de revient à hauteur dau moins 600 € HT/m² habitable devraient aussi s’imposer.

3) Enfin, les organismes HLM ne devraient pas manquer de s’intéresser au gisement du parc ancien à rénover : habitat indigne, mais aussi logements bientôt impropres à la location en raison de leur mauvaise performance énergétique (DPE F en 2028 et G en 2025).

Étant déjà organisés pour la rénovation de leur propre parc, les bailleurs sociaux ont un temps d’avance pour se positionner sur ce marché avant qu’il ne devienne concurrentiel : les opérateurs privés devraient tôt ou tard pivoter stratégiquement de la construction neuve à la restructuration de lexistant.

Ajoutons qu’organiser le repérage de ces opportunités d’acquisition est une raison supplémentaire de se doter d'un service de développement foncier, et que cette stratégie, si elle prenait de l’ampleur, serait de nature à accélérer la décarbonation du secteur du logement en France.


[1] C’est le cas notamment des 10 premiers par ordre décroissant de production de logements (moyenne annuelle 2018-2020, source RPLS) : CDC Habitat (3030 logements), Immobilière 3F, Erilia, Domofrance, Promologis, Dynacité, Vilogia, Alliade Habitat, Batigère IDF et Seqens (750 logements).

©  mihai-surdu - Unsplash

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