Différentes voies de diversification sont possibles : mieux couvrir les différents segments du LLS (du PLAI au PLS), faire du LLI, ou encore de l'accession aidée en PSLA, en BRS ou en « vente HLM ». Quelle que soit l’orientation envisagée, une préparation approfondie est nécessaire pour valider la stratégie.
Répondre aux besoins du territoire
Première question en vue de cette éventuelle diversification : quels sont les besoins du territoire ? Car même si la stratégie vise à dégager plus de recettes pour l’OPH, elles devraient être affectées in fine à l’offre de logement, en neuf comme en rénovation.
Cette première question appelle des études poussées que l’on ne détaillera pas ici. Grosso modo, il s’agit de comparer les populations éligibles aux différents produits aidés (locatifs ou accession, segment par segment) à l’offre disponible pour identifier les manques à combler. L’analyse peut être raffinée de multiples manières en tenant compte de la situation du marché libre, de la géographie de l’offre, de l’état des logements, de la dynamique démographique (nouveaux arrivants, décohabitation), etc.
L’étude va apporter énormément d’informations et révéler plus de besoins que l’OPH ne pourra en satisfaire. Dès lors il faudra faire des choix qui seront d’abord politiques :
- Quelles populations veut-on loger (ou aider à accéder à la propriété) et selon quel ordre de priorité ?
- Où et comment veut-on équilibrer l’offre pour plus de mixité ?
La finesse de l’étude permettra d’éclairer ces choix et de les exprimer de manière très précise, mais il faudra ensuite (en réalité de manière plutôt itérative) les confronter aux réalités de la gestion.
Tenir compte des contraintes de gestion du bailleur
Par définition, une stratégie de diversification est une stratégie de changement, impliquant l’acquisition de nouvelles compétences, donc un investissement. Faire le choix de développer une offre de logements locatifs intermédiaires, par exemple, peut être assez rémunérateur car les loyers sont relativement élevés, mais suppose des fonds propres et une capacité de commercialisation, puisque ces logements ne sont pas « attribués » comme les logements sociaux mais mis sur le marché. Ils sont susceptibles d’être vendus à terme (autre compétence) et d’impliquer le bailleur dans des copropriétés (autre compétence). Bref, c’est un tout autre métier, au demeurant concurrentiel : si ce marché est effectivement porteur, d’autres acteurs vont s’y intéresser.
Ce que nous voulons illustrer à travers cet exemple, c’est qu’il ne suffit pas que le développement d’une offre de LLI paraisse judicieuse au regard du marché et aux yeux des élus pour que la stratégie soit valide. Il en va de même, mutatis mutandis, des autres segments de diversification (accession aidée).
Or la validation de la stratégie sur le plan de la gestion n’est pas la seule affaire des gestionnaires. Ici aussi, le bailleur a besoin d’orientations politiques claires.
À ce stade, le bailleur a ainsi besoin de s’assurer :
- qu’il pourra produire suffisamment de logements sur ce(s) nouveau(x) segment(s) pour amortir son investissement de diversification (cf. point mort) ;
- qu’il pourra accéder à des fonciers ou à des VEFA compatibles avec le prix de construction et de sortie (loyers ou vente) des opérations.
Le premier point renvoie à un volume de logements à produire. En effet, il est rigoureusement impossible, pour l’OPH, de bâtir des scénarios et de faire tourner des modèles financiers sans une hypothèse à peu près fiable de volumes. Le point mort, c’est-à-dire le nombre plancher de logements à produire pour équilibrer les recettes et les dépenses, est une donnée de base. Pour le dire autrement, les recettes générées par 100 logements (en LLI, en PSLA, en BRS…) seront 10 fois plus élevées que les recettes générées par 10 logements, mais le ticket d’entrée en ingénierie sera identique.
Le second point renvoie à la ressource foncière et à son prix, mais également à une forme de répartition des « marchés » entre les différents opérateurs intervenant sur le territoire. Plus la collectivité est capable d’imposer ou de faire accepter cette répartition, moins l’OPH sera exposé à une concurrence qui rendrait sa stratégie risquée.
Un processus itératif
On aura bien sûr compris que le processus d’élaboration de la stratégie est tout sauf linéaire. Le cahier des charges de l’étude va orienter la réflexion et la collecte des données vers les sujets que le bailleur sait sensibles ou souhaite creuser. Les résultats de l’étude vont servir de base de dialogue entre les équipes du bailleur, celles de la collectivité et les élus, afin de parvenir à hiérarchiser et quantifier les objectifs. Assez rapidement les enjeux de gestion vont amener à reconsidérer les objectifs, réinterroger les données, bâtir de nouveaux scénarios, jusqu’à ce que la stratégie soit suffisamment claire et partagée pour devenir la feuille de route de l’OPH.
À travers ce bref article, nous espérons avoir convaincu les différents protagonistes – élus et gestionnaires – de la grande complémentarité de leurs rôles respectifs dans l’élaboration de toute stratégie de diversification.
© Unsplash - Taneli Lahtinen
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