Les locaux d’activités sont les victimes désignées du développement urbain dans le cœur du Grand Paris. Remplacés par des logements et des bureaux, rarement recréés dans les opérations mixtes en zone dense, ils sont repoussés toujours plus loin en grande périphérie.
Contrairement à ce qu’une analyse superficielle pourrait laisser croire, ce ne sont pas de prétendues incompatibilités de l’économie productive avec la ville qui sont à l’origine de ce mouvement : les raisons en sont essentiellement financières.
Les logements et dans une moindre mesure les bureaux génèrent nettement plus de revenus immobiliers que les locaux d’activités. Le changement d’affectation du foncier économique vers le résidentiel ou le tertiaire lui confère immédiatement une valeur supplémentaire dont le propriétaire comme l’aménageur vont profiter. Pour la même raison, il est plus facile d’équilibrer un bilan d’aménagement ne comportant pas de locaux d’activités.
Voilà pourquoi les entreprises de l’économie productive, pourtant pas les moins créatrices d’emploi, sont contraintes de s’éloigner toujours plus. À plus de 30 km de Paris, la prolifération de ZAE poursuit l’étalement urbain, allonge les trajets domicile-travail (quand l’éloignement ne les rend pas impossibles) et sature les axes routiers.
Est-ce une fatalité ? Non, mais pour renverser la tendance, il faut agir au moins à trois niveaux : la planification urbaine, le foncier et l’immobilier.
Pour commencer, il est urgent de mieux prendre en compte les activités productives dans les démarches de planification urbaine. Cela signifie analyser plus finement les impacts du développement urbain sur l’économie productive, puis définir des règles d’urbanisme qui garantissent la conservation ou la reconstitution de surfaces d’activité.
Cela ne suffira toutefois pas à protéger les activités productives de la pression foncière. Une protection efficace, particulièrement dans les zones mixtes où elle est très forte, consisterait à faire acquérir le foncier par un office foncier solidaire (OFS). Son modèle économique, fondé sur un portage à long terme et des montages dissociatifs, permettrait de proposer aux utilisateurs des loyers abordables et de maîtriser l’inflation des valeurs foncières.
Le dernier point concerne l’offre immobilière, aujourd’hui assurée par quelques opérateurs privés spécialisés qui n’ont pas toujours la capacité où l’intérêt à agir car la fragilité économique des entreprises utilisatrices et les recettes locatives limitées constituent des freins trop importants. En revanche, une foncière à capitaux publics ou mixtes disposant d’un patrimoine suffisamment étendu serait capable de réfléchir à des systèmes de péréquation économique pour le développement du parc et de diluer le risque locatif.
L’avenir des locaux d’activités franciliens mérite-t-il d’investir des fonds public dans la création d’un OFS et d’un opérateur immobilier dédié ?
Pourquoi pas si cet investissement contribue à la fois à faciliter l’accès à l’emploi, à limiter l’étalement urbain et à maîtriser les flux routiers.
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