Données immobilières, études et conseil

Tous les segments de marché ont-ils touché le fond en 2024 ?

Neuf ou ancien, individuel ou collectif, accession ou location… rien ne va plus sur les marchés résidentiels. Bilan d’une année 2024 encore particulièrement sous-active, où l’on détecte toutefois des trajectoires différentes selon les segments de marché.

Olivier Conus

Publié le 19/02/2025

 

Commençons par une analyse globale de la construction neuve. D’après les données SITADEL publiées fin janvier 2025[1], moins de 264.000 logements ont été mis en chantier en France en 2024. Il faut retourner aux années 1950 pour retrouver un tel étiage. À cette époque, la France comptait 41,6 millions d’habitants (soit 27 millions de moins qu’aujourd’hui). Du côté des autorisations, les volumes sont également à la peine avec moins de 330.000 logements ayant obtenu un permis, soit presque 2 fois moins qu’en 2006. 


 

Illustration - Construction résidentielle neuve - ADEQUATION
Construction résidentielle neuve - ADEQUATION

Maisons individuelles : le déclin accéléré d’un modèle autrefois dominant

La construction de maisons individuelles, segment majoritaire jusqu’en 2011, s’est effondrée à moins de 65.000 logements en 2024, une nouvelle baisse après des décennies de chute structurelle. Pour mémoire, au début des années 1980 se construisaient annuellement près de 200.000 maisons par an en France. Ce volume est tombé à 130.000 durant les années 1990, et à 120.000 entre 2010 et 2020. La dernière chute n’est que le prolongement accéléré d’une longue décroissance de cette activité.

Il est remarquable et encourageant que la vente des terrains individuels aménagés n’ait enregistré « que » -30% de baisse entre 2019 et 2024, soit un déclin moindre que celui de la construction « diffuse ». La construction sur terrains individuels aménagés est en effet une alternative moins consommatrice de sol.

Illustration - Construction résidentielle neuve - Maisons individuelles - France - ADEQUATION
Construction résidentielle neuve - Maisons individuelles - France - ADEQUATION

Promotion immobilière : des clients introuvables

Nous n’avons que trop souvent l’occasion de le rappeler, l’activité en promotion immobilière résidentielle a subi de plein fouet la crise depuis le printemps 2022, avec des volumes passés, pour les logements vendus aux particuliers, de 92.000 à 53.000 réservations annuelles entre 2022 et 2024. 

Les ventes en bloc (VEB) ont en partie amorti cette chute vertigineuse, passant de 44.000 à 55.000 logements entre 2019 et 2024, principalement grâce au développement du segment « locatif intermédiaire » et, dans une moindre mesure, au recours plus important des bailleurs sociaux à la VEFA, dans le cadre de plans de relance locaux à l’initiative de collectivités. Toutefois, cet apport n’a pas permis de compenser l’effondrement des ventes aux particuliers sur les principaux marchés français. 

Illustration - Vente en promotion immobilière - Logements ordinaires neufs en France
Vente en promotion immobilière - Logements ordinaires neufs en France

Résidences gérées : un moindre décrochage, mais une stabilité discutable

Environ 31.000 logements en résidences gérées ont été développés en 2025 en France, un volume quasi stable par rapport à 2023. Pour la partie privée, qui représente environ la moitié de ces volumes, en partie commercialisée en bloc, l’évolution est loin d’être uniforme selon le type de résidences et le segment de clientèles. Si 2020 et 2021 ont vu l’essor du coliving, après des années de forte croissance des résidences seniors, 2023 et surtout 2024 marquent le retour (dans les volumes) des résidences étudiantes. Pour les investisseurs institutionnels comme pour les particuliers, ce segment semble offrir une meilleure stabilité que le logement en résidence senior, défavorablement impacté par la défaillance de plusieurs exploitants, et au business modèle parfois plus risqué. 

Illustration - Construction résidentielle neuve - Résidences gérées
Construction résidentielle neuve - Résidences gérées "Privées"

Réhabilitation et rénovation : un démarrage en douceur

S’il n’existe encore que peu de données disponibles, l’activité commerciale réalisée dans la réhabilitation et la rénovation peut être approchée au travers de celle des principaux opérateurs du logement neuf, via les données « construction sur l’existant » de l’enquête ECLN[2]. Ainsi l’année 2024 aura-t-elle enregistré un peu moins de 7.000 logements commercialisés sur des programmes issus de réhabilitation ou de rénovation, soit un volume en légère hausse, mais sous la moyenne des 7 dernières années. 

Illustration - Réservations de logements sur des programmes de rénovation/réhabilitation
Réservations de logements sur des programmes de rénovation/réhabilitation

Marché de l’ancien : retour à la normale ?

Les notaires et les professionnels de l’immobilier sont d’accord sur le fait que les volumes de transaction dans l’ancien devraient avoir atteint un plancher en 2024 (autour de 750.000 pour les Notaires de France, 775.000 pour la FNAIM). Loin du record de 2021 (enregistré lors de la dynamique post COVID, qui suivait elle-même la hausse 2015-1019 alimentée par la progression du pouvoir d’achat immobilier des ménages), le volume reste toutefois honorable dans une vision historique, seulement 10 % sous la moyenne annuelle de la décennie 2010. 
Si la chute des volumes semble terminée, ces experts n’envisagent pas de réel rebond dans les mois à venir, compte tenu des nombreuses incertitudes et de l’instabilité politique qui limitent la visibilité des acquéreurs.

Illustration - Volumes de logements anciens vendus
Volumes de logements anciens vendus

Locatif : un marché sous tensions multiples

Le marché locatif est soumis à de multiples tensions concomitantes : les règles du DPE, avec l’impossibilité de relouer un logement classé en G depuis le 1er janvier 2024, ont réduit le parc (dans des proportions non mesurées à ce jour) ; les ventes en neuf à investisseurs se sont effondrées à partir de 2019, passant de plus de 60.000 unités à moins de 19.000 en 2024, avant même la disparition du Pinel ; enfin, la hausse des taux d’intérêt a freiné l’accession à la propriété et ralenti la rotation du parc. Tout cela se traduit par des marchés locatifs particulièrement tendus, qui le resteront sans doute encore plusieurs années. Les valeurs locatives ont progressé de +2,4 % en 2024 en moyenne à l’échelle nationale (+12 % entre 2019 et 2024). 

Illustration - Evolution des loyers moyens en libre (à l'offre) et des durées de publication des annonces - France
Evolution des loyers moyens en libre (à l'offre) et des durées de publication des annonces - France

Logement locatif social : un rebond insuffisant face à une demande toujours en hausse

Le logement social aura connu en 2024 une progression du nombre de logements financés de près de 8 %, soit plus de 98.600 unités. Un rebond bienvenu après le chiffre extrêmement bas de 2023. Toutefois, 13.300 logements s’intègrent dans la reconstitution liée au NPNRU[3] sans tenir compte des démolitions afférentes, 10 % à 15% des financements concernent des opérations d’acquisition-amélioration, et, comme chaque année, on sait que l’ensemble des logements financés ne sera pas intégralement réalisé.

Au-delà de ce signe encourageant bien que modeste, le nombre potentiel de nouveaux logements est donc loin de couvrir celui des nouvelles demandes, estimées à 100.000 en 2024 par l’USH, tandis que la demande totale atteint 2,76 millions de logements au 1er janvier 2025. D’où une tension qui continue de s’exacerber, en corrélation étroite avec les tensions du parc privé « libre ».

Illustration - Financement de logements locatifs sociaux
Financement de logements locatifs sociaux

En conclusion, les marchés immobiliers français, après l’effondrement de 2023, restent orientés très majoritairement à la baisse en 2024, mais dans des proportions bien moindres. Le point bas semble avoir été atteint et la première question qui se pose désormais est la capacité du marché à repartir de l’avant en 2025, dans un contexte où les incertitudes demeurent nombreuses. Et la seconde interrogation porte sur les différences temporelles de reprise selon les segments de marché, avec un même itinéraire jusqu’à ce jour, mais pas le même destin.


[1] Au sein du ministère de l’Aménagement du territoire et de la Transition écologique, la base SITADEL traite les données issues des demandes d’autorisation d’urbanisme.

[2] ECLN : enquête sur la construction de logements neufs, par le ministère de l’Aménagement du territoire et de la Transition écologique.

[3] NPNRU : nouveau programme national de rénovation urbaine. Source : ministère de l’Aménagement du territoire et de la Transition écologique.

©pexels-kindelmedia

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/ Tendance
juin 2025

Transformer les bureaux en logements ? oui, mais familiaux !

Axel Lecomte, DGA de Nanterre, chargé de la stratégie urbaine et de l’habitat

À Nanterre, comme ailleurs, la vacance des locaux tertiaires permet d’envisager leur changement d’usage. Mais le modèle économique de la transformation conduit presque toujours à des projets de résidences gérées, et rencontre une limite : la saturation. Nous en parlons avec Axel Lecomte, directeur général adjoint de la Ville de Nanterre chargé de la stratégie urbaine et de l’habitat. 

Équipe ADEQUATION
/ Regard
juin 2025

Qui a intérêt à transformer cet immeuble tertiaire en logements ?

Le sujet est dans l’air du temps et ce n’est nullement un effet de mode. Mais si on débat beaucoup de gisement et de faisabilité technico-économique, on parle moins de l’alignement des intérêts de toutes les personnes concernées. C’est pourtant une condition sine qua non de la transformation, et c’est souvent l’opérateur immobilier qui est en première ligne pour le réaliser. 

Quentin Lamour

28.000

C’est le nombre de logements réintégrés par les services de l’Etat dans le bilan des logements commencés en 2024. Un total de 290.000 logements vs 263.000 initialement annoncés.

Issu du FIL Résidentiel

15%

C’est la progression des mises en chantier des résidences (en secteur libre et social) sur les 12 derniers mois. Un volume inédit de 38.000 logements depuis février 2023.

Issu du FIL Résidentiel

0,76%

C’est la croissance brute du parc résidentiel français via la construction neuve en 2025. Un secteur qui peine à se renouveler ; 291.000 logements mis en chantier ces 12 derniers mois, soit une fraction modeste du parc total (38,2 millions de logements en 2024), avec de sensibles disparités entre régions. 

Issu du FIL Résidentiel

10%

C’est la part des ventes en promotion immobilière concernée par la rénovation / réhabilitation / surélévation en 2024 (7.000 logements au national). Un segment qui n’échappe pas à la crise (-33% vs 2021).

Issu du FIL Résidentiel

1%

C’est la timide progression du nombre de logements commencés ces 12 derniers mois, soit 291.000 unités au niveau national. Un chiffre modeste, mais le premier positif depuis mai 2022.

Issu du FIL Résidentiel

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/ Tendance
mai 2025

Une SAC agréée OFS, c'est possible !

La métropole angevine a démontré que le statut de société anonyme de coordination (SAC) était compatible avec l’activité d’organisme foncier solidaire (OFS). Créé sous ce statut et agréé en 2024, l’OFS ALTHI a commencé à commercialiser ses premiers BRS. 

Marie DEMANESSE
/ Tendance
avr 2025

L’accession abordable, futur cœur de marché ?

La notion de logement abordable continue de susciter réflexions et innovations émanant d’acteurs publics et privés de plus en plus divers. C’est peut-être le signe d’un changement de paradigme, généré par la crise mais aussi, souhaitons-le, susceptible de s’installer dans la durée.

Quentin Lamour