La diversification du parc HLM et son imbrication dans les copropriétés se sont accélérées au cours des 10 dernières années.
Selon les données SISAL, la VEFA a représenté 56 % de la production de logements réalisée par ou pour les bailleurs sociaux en 2022, contre 27 % en 2010. La VEFA, ainsi que la co-promotion, ont permis un développement plus massif des programmes mixtes, mais également une segmentation plus fine du patrimoine des opérateurs sociaux entre la diversité des produits en accession, locatif social, produits gérés (logements foyers, résidences sociales), locaux d’activité.
Cette tendance a été renforcée par les ventes HLM dans le parc ancien. La vente de la totalité des logements d’un même ensemble immobilier peut prendre de nombreuses années. L’organisme vendeur reste donc durablement présent dans la copropriété ainsi créée, en tant que copropriétaire et en tant que gestionnaire des logements qui restent sa propriété [1].
Un organisme HLM sur 4 exerce la fonction de syndic
Cette évolution conduit nombre d’organismes HLM à s’interroger sur la nécessité d’exercer la fonction de syndic. Créés en 2008, les syndics de logement social, dits « syndics solidaires », sont soumis aux mêmes dispositions réglementaires qu’un « syndic classique » : la loi de 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis et la loi Hoguet de 1970 ; à l’exception de l’obtention d’une carte professionnelle comme c’est le cas dans le privé. Ils adhèrent à une charte élaborée par la Fédération des coopératives HLM mettant en avant notamment « une gestion solidaire pour préserver le bâti et une information pour mieux gérer » [2].
Sur l’ensemble du parc social, soit 5,2 millions de logements, 600 000 logements sont dans des immeubles en copropriété, soit 11 % du parc, dont 150 000 lots gérés en tant que syndic par les bailleurs sociaux [3].
On compte à ce jour 160 organismes de logement social exerçant la fonction de syndic, soit près d’un organisme sur 4. La plupart des opérateurs de logement social intervenant en copropriété mixtes se posent la question de le devenir.
Les bailleurs sociaux peuvent rendre d’autres services aux syndicats de copropriétaires
Des lois récentes ont permis aux bailleurs sociaux d’exercer de nouvelles compétences : ils peuvent agir pour le compte de syndicats de copropriétaires d'immeubles faisant l'objet d'un plan de sauvegarde dans le périmètre une opération programmée d'amélioration de l'habitat (OPAH) ou d’une opération de requalification de copropriétés dégradées (ORCOD) [4]. Ils peuvent également réaliser toute opération ou tous travaux de rénovation énergétique pour le compte d'un syndicat de copropriétaires dont ils sont membres (loi Climat et résilience de 2021).
Par ailleurs, les activités qui s’appliquent à des copropriétés en difficulté ou qui sont en rapport avec la cession de logements locatifs sociaux relèvent du service d’intérêt économique général (SIEG). En ce sens, les syndics HLM sont poussés à obtenir des certifications telles que NF Habitat exploitation copropriété et plus spécifiquement Quali SR (Syndic prévention redressement des copropriétés).
La création d’un syndic solidaire est-elle incontournable ?
L’USH et la Fédération des coopératives HLM, au cours des dernières années, ont largement débattu de l’intérêt de leurs organismes à se doter d’un syndic, en lien avec les dispositions introduites par la loi ELAN, plus récemment avec l’accélération de la diversification du parc social et la montée en puissance des copropriétés en difficulté [5] .
Certains services assurés par les bailleurs ne nécessitent pas l’existence d’un syndic, et peuvent être rendus par le personnel habituel du bailleur social, avec toutefois une nécessaire acculturation à la gestion de syndic. De nouveaux métiers tels que responsable, coordinateur, ou encore chef de projet de copropriétés en charge du suivi de la vie des copropriétés administrées par d’autres syndics émergent largement.
Nous ne trancherons pas ici ce débat, mais il est intéressant de rappeler les enjeux de la création ou non d’un syndic.
- Enjeu d’image, de sécurisation et de prévention : la présence d’un syndic accrédite auprès des collectivités la capacité de l’organisme HLM à les accompagner dans des projets complexes (copropriétés dégradées, OPAH RU) nécessitant des compétences sociales, techniques et financières spécifiques, et à sécuriser les parcours des accédants dans un passage de statut de locataire social à celui de copropriétaires.
- Enjeu économique : la gestion de syndic peut apporter une nouvelle source de revenus pour les équipes de gestion du bailleur et permettre d’optimiser la gestion financière et technique des copropriétés dans lesquelles le bailleur est partie prenante, enjeu pouvant être prépondérant dans le cas de réhabilitation lourde.
- Enjeu de continuité de service : une fonction de syndic dans les copropriétés issues des ventes HLM /BRS permet d’offrir un service adapté aux copropriétaires issus du parc social, mais aussi d’intervenir suffisamment en amont dans le cadre des engagements de rachat de patrimoine et de garantie de relogement (PSLA, BRS, vente HLM).
- Enjeu de gestion et d'information : être présent au cœur de la gestion de la copropriété est utile pour contrôler le bon entretien des parties communes et des ouvrages et s’assurer que les « jeunes » copropriétés issues de la vente HLM ou de la transformation en BRS vivent bien [6]. Autant éviter de devoir racheter en masse des copropriétés dégradées… issues des ventes successives du parc social.
En conclusion, les organismes HLM ne peuvent pas faire l’impasse sur la gestion des copropriétés. Quant à l’opportunité de devenir syndic ? La réponse dépendra fortement de la part du parc concerné, mais aussi, et à ne pas négliger, des attentes des collectivités locales, parfois fortes en la matière.
[1] Le décret du 26 Novembre 2021 a permis un différé de 10 ans du statut de copropriété pour la vente HLM.
[2] Hlm.coop/contenu/le-syndic-solidaire
[3] Étude Wavestone : Le métier de syndic solidaire au sein du mouvement HLM : quelles perspectives ? Cahier Repères 89, septembre 2021.
[4] À titre de tiers de confiance
[5] Le rapport annuel du registre des copropriétés 2022 note la forte progression des impayés, et 57 % des copropriétés seraient sur 62 critères à risque potentiel.
[6] Certains acteurs pointent là de possibles conflits d’intérêt : l’organisme HLM peut être juge et partie lorsqu’il exerce à la fois en tant que membre du syndicat des copropriétaires, syndic de copropriété voire prestataire de service de travaux énergétiques.
© Fahrul Azmi - unsplash
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