Les statuts hybrides d’occupation connaissent un regain d’intérêt, à la faveur notamment des difficultés d’accession à la propriété. Mais de quoi parle-t-on ? Le principe est à la fois d’assurer un droit de « propriété » au ménage accédant à un logement, tout en limitant une partie de ce droit, ce qui en limite la valeur, donc le prix du logement associé.
Ce qui pourrait apparaître comme un tour de passe-passe renvoie en réalité à des pratiques bien connues et répandues, qui consistent à diviser le droit de propriété en un ensemble de droits (d’accès, d’usage, d’exploitation, d’aliénation, etc.). On peut penser au démembrement de propriété. Mais aussi, en termes d’accession à la propriété, à l’emphytéose, notamment développée un moment en France par les Hospices Civils de Lyon, ou, plus récemment, au diptyque OFS/BRS, ou encore aux annonces récentes de la Métropole de Rennes sur le bail à construction.
Réouvrir le champ de l’accession à la propriété
Les niveaux de prix atteints, même dans l’hypothèse d’un ralentissement de la hausse voire d’une baisse dans l’ancien, vont continuer à impacter durablement la solvabilité des ménages, en particulier dans les secteurs tendus.
La création des organismes de foncier solidaire puis du bail réel solidaire visait précisément, via un mécanisme de dissociation foncier/immobilier, à créer un statut hybride d’occupation pour le titulaire du contrat de BRS : ce dernier est à la fois propriétaire de droits réels immobiliers et « locataire » du foncier (il verse une redevance). Ce système, qui se développe fortement ces dernières années, est toutefois limité : par des critères sociaux d’éligibilité des ménages ; et par l’emploi de fonds publics (pour acheter les terrains de l’OFS).
Que faire pour les ménages dont les revenus sont trop élevés pour être éligibles, mais qui ne parviennent pas à acheter dans le libre ?
L'enjeu est de parvenir à massifier le recours aux statuts hybrides d'occupation, autrement dit de trouver les modèles qui permettent de s'affranchir des financements publics afin de pouvoir lever le « couvercle » des conditions de ressources des bénéficiaires.
À Lyon, nos premières analyses ont montré que ce type de modèles permettrait, en libre, « d’améliorer la desserte ménages d’au moins deux déciles de revenus », soit + 20 % de ménages en capacité d’acheter. On « réouvre » ainsi l’accession à la propriété à des ménages qui n’y avaient plus accès. Dans des marchés métropolitains tendus, ce type d'offre pourrait ainsi représenter, à terme, 10 à 15 % de la production.
Convaincre l’ensemble de la filière
Même si quelques exemples existent, et alors que de plus en plus d’opérateurs se lancent dans la réflexion et l’expérimentation, il reste difficile, à ce jour, de structurer ce foisonnement. Ces modèles doivent encore faire la démonstration qu’ils sont viables à droit constant et sans dégradation du bilan d’opération.
Ils ne pourront en outre se déployer que si l’ensemble des parties prenantes sont convaincues de leur intérêt.
• D’abord les promoteurs, dont l’intérêt bien compris dans ces montages est de regagner une clientèle insolvable autrement.
• Les ménages aussi, à travers les succès du BRS, se sont montrés plus réceptifs qu’on ne l’aurait imaginé à ce type de statut.
• Ensuite les banques, qui financent non seulement les ménages accédants, mais aussi les opérations des promoteurs.
• Enfin les collectivités, pour leur rôle prescripteur.
Un avenir de la propriété
Alors que l’ensemble de la filière accélère sa transformation, ces questions vont forcément beaucoup occuper l’ensemble des acteurs dans les années à venir. Nous avons pu le constater lors d’une série d’ateliers qu’ADEQUATION, en tant que membre de Fonciers en débat, anime pour cette association.
L’avenir de l’accession à la propriété dépasse la question des statuts hybrides d’occupation, mais ils en seront certainement une modalité de plus en plus fréquente. Ils sont un levier d’action publique autant qu’une des conditions de réussite des programmes pour les opérateurs.
© unsplash - ben-o-sullivan
Je suis d'accord avec le constat.
L'accession à la propriété est un élément important et l'ensemble des acteurs de l'immobilier vont devoir faire preuve d'innovation pour proposer de nouvelles solutions.
La vraie question réside dans l'acceptation de telles propositions par les français.
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