Après trois belles années de construction neuve de logements entre 2017 et 2019, la production s’est effondrée en 2020 passant de 400 000 à 350 000 logements, avec une projection autour de 310 000 logements pour l’année 2021 (voir annexe). Si les facteurs de cette chute sont bien connus, l’analyse plus fine des filières de production, de la répartition territoriale et du rôle que peuvent jouer les investisseurs permet de distinguer des leviers de croissance permettant d’atteindre à nouveau les 400 000 logements annuels, incluant également la réhabilitation lourde d’actifs existants (logements et transformation de bureaux) en réinterrogeant la géographie et les échelles d’intervention (bâtiment, quartier, portefeuille).
La décomposition de l’objectif de 400 000 logements peut se faire de la manière suivante :
110 000 logements seront produits directement par des particuliers avec la construction de leur maison individuelle. De même nous estimons que la production de logements sociaux dits familiaux peut atteindre 70 000 logements par an répartis de manière quasi égale entre une maîtrise d’ouvrage directe bailleur et la Vefa auprès des promoteurs. Ces derniers pourraient vendre au détail environ 100 000 logements à comparer aux 120 000 logements des années fastes. La baisse de la vente au détail s’explique par un repositionnement de l’offre du point de vue géographique vers les marchés autres que franciliens et de grandes métropoles régionales. Le déploiement de l’expérimentation « Pinel breton » qui cible les zones B2 permet ainsi de gagner 10 000 logements en vente au détail, principalement dans les villes moyennes par rapport à la production actuelle (moins de 90 000 logements en 2020).
L’accession au détail pourrait en partie être comblée par le développement du BRS (potentiel de 10 000 logements dans le neuf) mais surtout par celui de la vente en bloc auprès des investisseurs institutionnels avec deux produits : l’intermédiaire et le libre. Le potentiel en locatif intermédiaire est estimé à 20 000 logements alors que la production actuelle plafonne autour de 12 000. L’aménagement de certains dispositifs (fiscalité locale, intégration dans le quota SRU, etc.) permettrait d’atteindre cet optimum, en particulier dans les zones tendues où le LLI est attendu. Le locatif libre est également en développement. Le plan de relance de 2020 a permis de créer des opportunités et d’amorcer ainsi l’existence d’une véritable filière. Comme le LLI, ce locatif libre porté par les investisseurs maintiendrait une offre locative dans les secteurs les plus tendus, permettant une alternative à la baisse du Pinel.
Le marché des résidences services est également un marché à encourager, la production pourrait augmenter de 30 000 à 40 000 logements par an, également répartie entre le social et le libre, avec éventuellement, des services mutualisés. Ce type de produit permet également de trouver une rentabilité à des projets de transformation des actifs existants, leur équation économique étant plus performante que celle du logement ordinaire.
Enfin, nous constatons une production annuelle de 30 000 logements environ répartis sur l’ensemble du territoire et portée par des petits maîtres d’ouvrage (family office, SCI de particuliers, etc.) bénéficiant, entre autres, du dispositif de déficit foncier. Cette production s’oriente de manière préférentielle vers la réhabilitation lourde. Cette production pourrait être encouragée afin de permettre aux investisseurs de stabiliser ce segment autour de 30 000 logements via la restructuration lourde d’actifs existants, notamment acquisition/amélioration de copropriétés existantes. Ce segment est à coordonner avec les interventions publiques sur les copropriétés dégradées.
Ce scénario serait atteignable à partir de 2023 à la condition de mettre en œuvre certains dispositifs dès septembre 2021.
La revalorisation de l’acte de construire passe aussi par la production de fonciers constructibles. Les fonciers « faciles » (en extension urbaine, dent creuse, densification de parcelles pavillonnaires) seront de plus en rares. Il faudrait donc organiser de manière collective la mobilisation de fonciers de recyclage, (requalification et densification de quartiers anciens, reconversion de friches industrielles/commerciales, transformation de bureaux en logements, entrées de villes…) plus longs et plus complexes à exploiter.
Via des partenariats et de nouveaux instruments financiers (voir annexe), les investisseurs peuvent avoir un rôle à jouer auprès d’opérateurs urbains, à la fois en remontant collectivement la chaîne de production et en se positionnant plus en amont sur le foncier mais aussi en ayant la possibilité d’intervenir dans des logiques de portefeuilles fonciers permettant de mutualiser les risques. La durée du portage foncier reste cependant à interroger avec un modèle économique à trouver et des garanties juridiques à apporter. Mieux sécuriser ces aspects permettrait aussi de libérer davantage de sites détenus par des foncières, dont l’analyse du risque ne se fait pas en faveur d’une transformation à l’heure actuelle.
© C. Dustin - Unsplash
Bonjour, merci pour cet article enrichissant. Où peut-on se procurer l'annexe?
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