Comment faire converger les acteurs des projets de territoire ?

Transformer les friches en lieux de vie ; développer les activités productives en ville ; organiser les circuits courts alimentaires. Ces enjeux sont centraux pour les territoires urbains comme ruraux. Pour autant, de nombreux projets d’aménagement et de valorisation de sites portant sur ces thématiques peinent à se concrétiser. L’une des explications réside dans la difficulté d’aligner les logiques portées par trois catégories d’acteurs : les collectivités ; les utilisateurs et usagers ; les propriétaires et opérateurs urbains.

Perspective réalisée par AA Group pour le projet d’extension des Platières ©Em2c

Levier 1 - Identifier le point de convergence des différentes collectivités

A partir d’un diagnostic des enjeux territoriaux, du cadre réglementaire et des stratégies politiques aux différentes échelles, il s’agit d’identifier le point de rencontre permettant de bâtir une « coalition » autour du projet, et de dépasser ainsi concurrences territoriales et rivalités politiques.

Pour le projet DMC, l’étude menée par ADEQUATION et ses partenaires a montré l’enjeu de réguler la concurrence avec les autres projets structurants de l’agglomération (Mulhouse TGV positionné sur le tertiaire, Fonderie sur le numérique), tout en inscrivant Mulhouse dans la dynamique de la métropole voisine de Bâle. Un cap fédérateur a alors été défini pour le site DMC : le transformer en lieu d’émergence de nouvelles activités, utiles à la fois pour Mulhouse et son environnement élargi.

Pour le projet des Platières, le partenariat noué entre la Communauté de communes et le Groupe em2c a permis de définir des objectifs mobilisateurs à plusieurs niveaux de territoire : créer une polarité agroalimentaire pour apporter de nouveaux débouchés aux producteurs locaux, dans une logique de circuits courts en phase avec la stratégie d’autonomie alimentaire de la Métropole de Lyon ; accompagner le développement des entreprises industrielles locales, en lien avec les politiques de soutien régionales et nationales.

Levier 2 - Prendre appui sur des pionniers capables d’enclencher des dynamiques collectives

Ce levier consiste à s’appuyer sur des utilisateurs pionniers, pour matérialiser le positionnement du projet et créer des dynamiques collectives avec les acteurs locaux et les futurs arrivants.

Pour DMC, l’association Motoco issue d’une école de design bâloise a joué ce rôle, en investissant un bâtiment industriel pour mettre en location des espaces d’incubation de projets culturels. Motoco a noué des partenariats avec les acteurs locaux (école d’arts, centre d’art contemporain) et facilité la labellisation du projet DMC dans la démarche de planification tri-nationale IBA Basel 2020. Motoco a ainsi permis de tester des nouvelles activités pour le développement de l’agglomération, tout en contribuant à resserrer ses liens avec la métropole bâloise.

Processus de déploiement proposé par Adequation et Nova 7 pour le projet DMC © Citivia

Pour les Platières, l’implantation du grossiste alimentaire Ducreux au sein d’un bâtiment réalisé par le Groupe em2c a joué le rôle de locomotive. Cela a permis de concrétiser la vocation du projet sur les circuits courts alimentaires, grâce à l’ambition de Ducreux de renforcer ses liens avec un fournisseur agricole local et d’optimiser ses circuits de distribution de produits frais auprès des restaurateurs locaux.

Levier 3 - Définir un modèle économique combinant performance financière et qualité urbaine

Ce levier vise à définir un modèle économique permettant d’aboutir à un prix de cession foncière en phase avec les stratégies de valorisation des propriétaires. Ce prix doit aussi permettre aux opérateurs (aménageurs, promoteurs, bailleurs) de produire et gérer des lieux de vie qualitatifs, en phase avec les attentes et budgets des usagers, tout en atteignant leurs objectifs de rentabilité.

Pour DMC, l’implantation de Motoco était conçue dès l’origine autour d’un projet viable financièrement, notamment grâce aux événements permettant de financer les loyers réduits des projets culturels. Motoco a versé des loyers progressifs suivant la montée en puissance du projet. Cela a permis de tester et démontrer l’impact positif du projet pour le territoire, ainsi que la capacité du porteur de projet d’autofinancer son activité.

Pour les Platières, le remembrement foncier et l’aménagement ont été financés intégralement par le Groupe em2c via sa filiale Valoripolis. Le fléchage de la production de fonciers à vocation économique en extension d’un parc d’activités existant a permis d’optimiser les coûts d’équipement. Ce qui a rendu possible la réalisation de travaux d’aménagement paysagers ambitieux, dans le cadre d’une opération financée sans subvention publique.

Levier 4 - Guider la transformation du site autour d’un récit ancré dans le territoire

Ce levier consiste à donner du sens à la transformation du site, autour d’un récit guidant le projet. Les éléments définis en amont concernant l’avenir du site doivent être mobilisés (objectifs fédérateurs, dynamiques d’acteurs, viabilité du montage). Ce récit doit aussi s’appuyer sur une histoire ancrée dans le territoire, son identité, sa morphologie, ses usages.

Pour DMC, la vocation axée sur les activités émergentes et les industries créatives a permis d’inscrire le projet dans la continuité de l’aventure industrielle de l’entreprise textile DMC, fondée en 1746 à Mulhouse et toujours présente sur une partie du site d’origine.

Pour les Platières, le projet de polarité agroalimentaire s’est fondé sur la tradition agricole du Plateau de Mornant, encore très prégnante, et son positionnement précurseur sur les circuits courts avec la présence depuis 40 ans d’un important magasin de producteurs.

[1] Etude de positionnement et de programmation réalisée par ADEQUATION, Nova7 et Sareco, en 2012/2013, pour la Ville de Mulhouse et la SPL Citivia

[2]Projet d’aménagement porté par le Groupe m2c (opérateur intégré d’aménagement, promotion, construction), via sa filiale Valoripolis en partenariat avec la Communauté de communes du Pays Mornantais (COPAMO), depuis 2018, afin de créer 800 emplois directs sur le territoire

©Marios Gkortsilas-Unsplash - ©L.Cipriani